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Voltige de pente (1/6)

sommaire

1 Introduction à la voltige en portance laminaire, sur pente littorale 

2  Nos planeurs

3 Voltige thermique de relief

4 Construire sa voltige

5 Programme de voltige progressive

6  Réglage d’un planeur de voltige

1/ INTRODUCTION À LA VOLTIGE EN PORTANCE LAMINAIRE, SUR PENTE LITTORALE

préambule

Sera évoquée ici, de manière succincte et concrète, une expérience personnelle remontant à plus de trente ans, n’ayant pas vocation à être une quelconque référence. Il s’agit seulement de rapporter les particularités et les intérêts que cette expérience a permis de ressentir quant à l’aérologie propre à ces sites, ainsi que le matériel utilisé.

Cet exposé n’abordera que la voltige dite « Aresti », les planeurs employés étant des voltigeurs classiques sans stabilisateur ni dérive à grand débattement. Pour une description détaillée des figures et enchaînements, se reporter au site de François Cahour voltige-planeur-rc.net, ainsi qu’aux articles à suivre présentés par Andre R.

Henri Garnier

Les sites

Les lois coercitives qui nous sont maintenant imposées restreignent les possibilités et il incombera à chacun de vérifier (Géoportail) quels sites et quelles altitudes de vol sont autorisés avant de se lancer.

Avant cela, les sites visités ont été nombreux, la côte sud (Var), la côte ouest (de la Gironde à la Somme), également quelques endroits à l’étranger. Il s’agissait de dunes, de pentes classiques herbeuses ou broussailleuses à sommet arrondi, de falaises. Les dénivelés allaient de quelques mètres à environ 130 mètres. Ces sites ayant pour point commun la qualité de la portance (on y reviendra plus loin), ils n’en gardent pas moins des aspects spécifiques pouvant rendre délicates les phases d’atterrissage et/ou décollage.

Si, sur tous ces sites, la force du vent (lorsque > 60 km/h) pose déjà en elle-même problème au décollage, la difficulté est très accentuée en vol de falaise. Je me souviens de vols au Tréport, Ault ou Criel-sur-mer à la fin des années 80. Le décollage dans des vents très forts était particulièrement ardu. Il fallait se faire lancer le planeur par un modéliste local expérimenté, se tenant au bord de la falaise, haute de plus de 100 mètres, et lui-même assisté d’un aide le retenant par la ceinture… Il jetait le planeur incliné à 45 degrés vers le bas, en nous priant de pousser le manche de profondeur à mi-course. Conseil que je n’ai pas suivi la première fois (il faut toujours écouter les modélistes locaux !), j’ai récupéré à grand-peine le planeur désemparé, projeté en arrière. Il faut dire que le ressenti juste en retrait de la falaise est trompeur, on ne perçoit guère le souffle, alors que juste devant se dresse un mur d’air ascendant, quasi compact, propulsé à très grande vitesse avec un véritable cisaillement. Le contact du planeur avec celui-ci ne se fait pas « en douceur », c’est un genre de confrontation !

Par la suite le vol en lui-même est un régal, très facile, avec une portance qui s’étend assez loin devant la falaise (j’ai pu m’aventurer à une distance de 100-200 mètres je pense).

De même que le décollage, l’atterrissage par vent fort sur une falaise est complexe et volontiers destructeur. En raison de l’arête au sommet de la falaise, le vent forme derrière elle un rouleau (rotor), d’autant plus grand et violent que le vent est fort. Supposons être en présence d’un vent d’ouest > 60 km/h. Juste au bord de la falaise, on ne le ressent quasiment pas. Si on recule, au bout de quelques mètres le vent au sol semblera venir de l’est, tout en soufflant fort. Le diamètre du rouleau augmente avec la force du vent, il peut facilement atteindre une vingtaine de mètres (dans les cas que j’ai rencontrés). Sur les falaises mentionnées plus haut, j’ai vu des planeurs de 4 m arriver tranquillement derrière la falaise, le pilote pensant se poser face au vent. Ces engins étaient soudainement jetés sur la tranche à 10-15 m du sol et prenaient « contact » avec lui dans la même position. Ce jour là, il fallait lester les planeurs au sol, faute de quoi ils se faisaient retourner… La solution était d’arriver avec un maximum de vitesse, une vingtaine de mètres en arrière de la crête, pas trop haut et parallèle à celle-ci (un peu comme un surfeur à l’intérieur du rouleau de la vague, ici à l’intérieur du rouleau d’air) et de plaquer le planeur au sol au dernier moment.

Le vol de dune ne pose aucune difficulté, à l’exemple du site très (voire trop) fréquenté de la dune du Pyla, où j’ai compté un jour 40 parapentes en vol, sans parler des modélistes et des touristes à pied. Il m’est arrivé à une époque de voler sur de plus petites dunes, l’altitude atteinte étant limitée mais avec la possibilité de longer assez loin le profil de la dune. Nombre de ces sites sont maintenant protégés ou interdits. La plus grande gêne selon moi venait du sable, qui s’insinue absolument partout dans le planeur. D’où l’intérêt de voler juste après une averse qui a compacté le sable (cas fréquent en automne-hiver avec les orientations ouest ou sud-ouest).

J’ai pu aussi, dans les années 80 et 90, voler au bord de la Méditerranée, pas loin de la Seyne, sur de jolies pentes de bord de mer recouvertes de broussailles et arbustes. Planeurs rustiques recommandés, puisqu’il fallait les poser à mi-pente en pleine zone de portance dans lesdites broussailles (ou parfois sur la route goudronnée, après avoir protégé le dessous du fuselage et l’intrados des saumons…)

Actuellement, pour le vol dynamique laminaire, je ne fréquente plus que les sites du nord Cotentin, offrant des pentes lisses à sommet arrondi. La vaste pente des Pierres Pouquelées combine une portance exceptionnelle (pour moi la meilleure que j’ai rencontrée depuis 43 ans de pratique du VDP) à une grande facilité d’atterrissage. Il s’agit d’une pente officielle et les contraintes légales récentes (signalement) ne s’appliquent pas si on est licencié FFAM. Attention sur certains sites locaux de bien choisir la zone d’atterrissage pour éviter les ubiquitaires et redoutables ajoncs. Les paysages et lumières participent grandement au plaisir de voler dans ces endroits.

                      Pour en terminer ici, deux inconvénients communs à tous ces sites :

  • d’abord les embruns salés, d’autant plus présents que le vent est fort : attention aux contacts électriques (ex raccordement des servos d’ailes), qu’il faut entretenir en pulvérisant régulièrement un nettoyant adapté), les clés d’ailes maintenant en carbone y sont insensibles mais autrefois les clés acier étaient rapidement attaquées. Ils affectent également la qualité optique des verres de lunettes ainsi que des lentilles des caméras. A l’époque où nous en embarquions à bord des planeurs, il fallait systématiquement se poser et nettoyer les optiques après 15-20 minutes. Prendre garde aux vols prolongés dans ces conditions, on a la mauvaise surprise de voir la qualité d’image se dégrader nettement au fil de l’enregistrement.
  • l’effet de contre-jour est violent en bord de mer, non seulement lorsque le soleil baisse le soir sur une pente ouest ou sud-ouest (c’est le cas n’importe où) mais aussi à cause de la réverbération sur l’eau. La combinaison des deux peut très facilement faire perdre la notion de la position du planeur en voltige, même avec une décoration contrastée, qui ne sert plus à rien dans ce cas.

Les particularités et intérêts du vol dynamique côtier

J’apprécie beaucoup les sites montagneux, d’ailleurs je pratique le vol de pente en moyenne montagne la plupart du temps. On y vole dans un air peu dense, avec des conditions changeantes, des thermiques, parfois des turbulences, des rabattants. Le cadre est exceptionnel mais le vol parfois « piégeux ». Pendant des années j’ai pratiqué la voltige uniquement sur de petits sites à l’intérieur des terres, le gain d’altitude était laborieux et il fallait savoir enrouler la bulle avant d’envoyer les figures !

Les sites côtiers reçoivent un vent qui n’a rencontré aucun obstacle avant d’atteindre la pente : l’écoulement est laminaire. L’idéal est que la pente soit lisse (pas d’irrégularité de relief, pas d’arbre…). Le voltigeur atteint alors son Graal : une portance dynamique constante, sans la moindre turbulence. L’air plus dense, souvent chargé d’humidité, avec un caractère presque « collant » ressenti aux manches, permet d’y inscrire les figures avec la sensation d’évoluer dans un élément quasi solide. Les trajectoires sont rigoureusement tenues. Toute action aux manches est fidèlement retranscrite en vol (aucune turbulence ni thermique de passage n’intervient), de manière parfaitement reproductible à chaque répétition de la figure. Cela permet un entraînement très efficace, on peut se corriger au fur et à mesure et éliminer les erreurs et imperfections, sans se préoccuper aucunement de la prise d’altitude.

  • Avec un planeur bien réglé (attention, la qualité et la puissance de l’ascendance dynamique peuvent rendre paresseux et moins exigeant sur les réglages), on arrive à une grande précision dans les figures que, personnellement, je n’ai jamais obtenue sur les autres sites. Les figures passent au cordeau, les arrêts (par ex dans les tonneaux à facettes) sont particulièrement francs, les paliers d’entrée et sortie sont bien rectilignes, etc…
  • La puissance de la portance rend indispensable de ballaster les planeurs dès que le vent monte. Des voltigeurs purs et durs donnent alors leur pleine mesure dans ces conditions (Stingray, Aresti 108 plus encore, sur lesquels je reviendrai plus tard) et autorisent une voltige de très grande amplitude, très précise, très gratifiante (lorsque le pilote est dans un bon jour et sait « faire honneur » à un site exceptionnel !). Pour moi, c’est une recherche d’esthétique et d’harmonie, une recherche d’osmose avec le site et les éléments, lesquels s’adressent véritablement aux cinq sens. Assez initiatique et incommunicable.

J’apprécie les pentes littorales assez hautes et à forte déclivité, où la composante de dérive n’est pas trop marquée (ressentie toutefois lors des vrilles prolongées, lors des enchaînements, d’autant plus que le planeur est peu chargé). Ces reliefs permettent de voltiger juste devant soi ou en-dessous (par ex des 8 verticaux avec la jonction des boucles à hauteur des yeux et l’inversé qui se termine bien bas …). Autre avantage : la ligne d’horizon parfaitement rectiligne donne un repère idéal pour caler et exécuter les figures, notamment les indispensables paliers horizontaux d’entrée et sortie. Il est appréciable, par exemple, d’avoir un tel repère pour les tonneaux lents ou à facettes de grande amplitude.

Sauf en cas de vent fort, ces sites sont fréquentés, ce qui peut poser problème pour la pratique de la voltige. J’essaie maintenant, autant que possible, de pratiquer lorsque je suis seul : le voltigeur n’est pas toujours bien vu, certains pensent qu’il fait montre d’ostentation (alors que la voltige nécessite l’humilité et la remise en question) ; il prend de la place en l’air et fait peur. J’avoue que la crainte est réciproque, je redoute comme la peste ces sites ultra-fréquentés avec X planeurs en l’air, prenant des trajectoires totalement imprévisibles. L’idéal est de se retrouver à quelques voltigeurs habitués à s’entraîner ensemble, c’est ce que nous faisions à la grande époque, ayant constitué un groupe d’amis qui construisaient et pilotaient de concert. Il nous arrivait de voler jusqu’à six heures d’affilée, mais on avait 25 ans de moins et les entraînements étaient entrecoupés de périodes de défoulement ou de vols en patrouille (que les sites littoraux rendent très accessibles).

Galerie

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Henri Garnier
                                                                                                                   à suivre : Nos planeurs

4 commentaires

  • Article très sympa… Humilité et lucidité en ce qui concerne l’avenir du vdp…
    Conseils éclairés et lumières des photos…
    Ça donne envie….
    Bravo…

    Répondre
    • Merci Jean-Michel.
      L’avenir du planeur RC prend, je le crains, une teinte crépusculaire dans notre pays…
      Notre motivation reste intacte.
      Au plaisir de se retrouver peut-être un jour sur ces sites d’exception.
      Henri

      Répondre
  • Belle série d’articles Henri !
    Et content de voir que tu voles encore depuis les temps anciens où l’on se croisait sur les pentes alpines (Semnoz, Notre Dame de Vaux).
    J’ai toujours été en admiration devant la qualité de fabrication de tes modèles et ceux de ton frère ! Ailes coffrées balsa avec un état de surface juste hallucinant et pareil pour l’entoilage !
    Passes le bonjour à Alain.
    Au plaisir de se recroiser peut être un jour sur une pente !
    Pierre

    Répondre
  • Hello Pierre.
    Je te remercie. Tu as quant à toi excellé dans ton domaine.
    Nous pratiquons de notre côté toujours le vol de pente, aussi régulièrement que possible, la voltige demeurant notre penchant naturel !

    Répondre

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