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Le vol thermique de relief de François Cahour

Le flanc sud de l'Aiguille Croche offre une pente gigantesque bordant un éboulis de schistes générateur d'ascendances copieuses. Le sommet de l'éboulis apparait au dessus de la pente d'herbe et plonge de 800m. La pente a une inclinaison variable entre 30 et 45° obligeant à savoir se poser en pente...40minutes de marche depuis la voiture, planeur et radio dans le sac.

Le VTR  ou Vol Thermique de Relief consiste à utiliser pour se maintenir en vol, principalement les ascendances thermiques provoquées par la configuration du relief exposé au rayonnement solaire. Il se distingue du vol de pente par l’origine des ascendances : en vol de pente, c’est la déviation de l’air par un relief qui est à l’origine de l’ascendance. Cette situation se rencontre principalement sur les rivages en bord de mer. Le matin le vent de terre se dirige vers la mer et l’après-midi le vent de mer se dirige vers la terre et est dévié vers le haut par l’obstacle du rivage. L’ascendance provoquée par un dénivelé inférieur à 1m est déjà parfaitement utilisable par sa régularité. On parle alors d’ascendances dynamiques par opposition aux ascendances thermiques. En VTR, c’est l’air chauffé par le sol qui génère l’ascendance, sur place.

Ci contre, au col de la Louse dans le Beaufortain, un Easy Glider lors de son tout premier vol. On est ici en vol de pente. Ci dessous au sud de l’Aiguille Croche, on est en vol thermique de relief. Les pompes sont au sud et le vent géographique est du nord.

 

Sur le flanc sud d e l'Aiguille Croche des éboulis chauffés par le soleil génèrent des ascendances particulièrement actives. Le site se rejoint par 40minutes de marche sur un sentier. Il faut savoir atterrir en pente pour pouvoir exploiter ce site.
En VTR, une analyse des causes possibles d’ascendance devient nécessaire. L’ascendance thermique est provoquée par l’échauffement de l’air au contact d’une surface plus chaude que l’air ambiant : l’air se dilate, devient donc moins dense et s’élève. Le courant ascendant est soit sous forme de bulle soit sous forme continue.

 

Cette surface sera minérale comme des rochers ou des constructions ou même un parking. En montagne, les surfaces rocheuses éclairées par le soleil sont nombreuses et facilement repérables. Elles sont repérables directement sur le terrain ou sur une carte à petite échelle. Les cartes IGN au 1/25 000 sont très pratiques pour prévoir ces zones d’ascendance propices aux vols de nos modèles. Associées à des surfaces plus froides, absorbant l’énergie thermique du soleil comme des lacs ou des forêts, les rochers créent alors des contrastes thermiques, générateurs d’ascendances bien localisées et plus ou moins régulières. C’est l’exploitation de ces ascendances qui permet le vol thermique de relief.

 

 Sur le terrain, il arrive que des ascendances dynamiques se combinent avec des ascendances thermiques. A des ascendances dynamiques ou thermiques sont toujours associées des descendances tout aussi vigoureuses. Il devient parfois difficile de bien distinguer l’origine réelle de l’ascendance, d’autant plus que parfois les descendances dynamiques contrarient ou renforcent les ascendances thermiques et vice et versa. Enfin les phénomènes varient en fonction des vents géographiques du moment et de l’heure de la journée. Beaucoup de pilotes restent prudemment sur des sites connus, fréquentés par des habitués. Ils se privent alors d’une multitude de terrains de vol possibles et des plaisirs de leur découverte. Les sites utilisables en VTR sont en réalité très nombreux pour qui sait interpréter le paysage ou/et sa représentation sur les cartes géographiques. La variété des paysages de nos régions offre une multitude de sites de vol à qui sait se poser en pente. Ci dessous, toute la crête est volable souvent des 2 côtés. Entre le Roc du Vent et la Roche Merle.  On se pose à gauche.

Au fond, juste au dessus du Roc du vent dont on voit le sommet, une crête de 10km, avec de nombreux sites possibles pour qui sait lire une carte et marcher un peu.

Procédons en trois étapes :

  1. Repérer les zones volables avant de se rendre sur le terrain. Voir les cartes IGN au 1/25000. La page RC Slopes renseigne utilement sur les sites déjà répertoriés.
  2. Sur le terrain évaluer la probabilité des ascendances à rechercher et des descendances à éviter.
  3. Explorer la zone en sécurité, détecter la réalité des ascendances et se poser en sécurité.
Un Easy Glider lors de son tout premier vol de test au Col de la Louse au dessus du lac de Saint Guérin via Arêches.

Sortir des sentiers battus 

Les pilotes expérimentés savent que les zones génératrices d’ascendances thermiques sont innombrables. Même à l’échelle modéliste, la diversité des reliefs et de leur couverture végétale crée une mosaïque de zones favorables entrecroisées avec des zones défavorables. La facilité étant de se cantonner aux zones connues et donc largement fréquentées. Mais cette attitude bloque la progression et enferme le pilote dans une certaine facilité de simple consommateur. Si en plus le pilote n’utilise que des modèles achetés tout faits et prêts à casser, il s’éloigne du vrai modélisme et de ses joies intenses toujours renouvelées.

Ici un Quartz en vol dos à la Roche Chevalière au dessus du Cormet d'Arêches. En arrière des rochers les turbulences sont accentués par le vent géographique venant de l'ouest.en haut à droite de l'image.

Observer et interpréter 

La recherche des zones de vol s’effectue en observant le paysage. Celui-ci n’est plus un simple décor pour nos évolutions, mais devient un partenaire qu’il faut savoir comprendre et interpréter.

Cette compréhension s’effectue aussi à l’aide du modèle, qui en vol reste le meilleur moyen de détecter les ascendances. Donc avant de lancer, chercher les zones les plus favorables et après avoir lancé, apprendre à bien détecter puis exploiter les ascendances probables.

 

Si des gadgets permettent de confirmer la zone d’ascendance, ils ne sont réellement utiles qu’en vol de plaine, quand le modèle est très éloigné et que son observation pratique, devient réellement difficile. Les variomètres à retransmission au sol* se généralisent depuis le développement des radios en 2.4GHz. Mais leurs qualités sont très variables et les habitués du VTR ne s’en servent la plupart du temps, que pour se rassurer ou pour éliminer les zones trop défavorables.

Le pilotage 

Le planeur reste le moyen le plus sûr de détecter les zones d’ascendances.

Si les machines de dernière génération, à grand allongement et faible charge alaire, sont les plus efficaces pour trouver les ascendances, leurs caractéristiques les cantonnent souvent à ne faire que cela. On se maintient en l’air grâce aux qualités intrinsèques du modèle plus que par les talents réels du pilote. Les plus chevronnés, s’étonnent parfois que de superbes machines restent au sol par temps calme pourtant très favorable aux ascendances. La facilité de pilotage de ces superbes planeurs ne conduit pas toujours les pilotes à s’interroger sur leur propre capacité à détecter puis exploiter au mieux l’ascendance. Ces machines montreront la voie quand plus rien ne tient en l’air sauf elles, mais seulement si le pilote est à la hauteur.  Donc revenons-en au pilotage !

Un Sylphe, planeur de voltige totale de 3m, face au Mont Blanc et au massif des Dômes de Miage et de Tré-la-Tête.

La base :

Pour détecter l’ascendance, il faut que le planeur vole à vitesse régulière. Sachant que pour une charge alaire donnée, la vitesse de vol d’un modèle est définie par l’incidence de l’air sur le profil. Il convient de voler à incidence constante pour conserver la même vitesse. Ceci posé et facile à comprendre, il faut bien constater que la plupart des pilotes laissent leur modèle osciller en altitude et en vitesse, faute de corrections instantanée de la trajectoire, aussi bien en ligne droite qu’en virage. Quand en plus une brise plus ou moins régulière se manifeste, le modèle change en permanence d’attitude de vol et son incidence effective n’est jamais constante. Ceci empêche de ressentir les zones ascendantes.

Assiette du Troll en passage dos en au port de Bales piloté par Stéphane Combet.
Et du Quartz sur le ventre : Steve Lange et François Cahour créateur du Quartz.

Cette vidéo  de Stéphane Combet montre le Troll, le Quartz et le Sylphe pilotés par Steve Lange et François Cahour, le créateur de ces 3 machines.

En volant à vitesse constante, le fuselage a toujours la même position par rapport à l’horizontale. A titre d’exemple, j’ai réglé le calage de l’aile de chacun de mes planeurs, pour que le fuselage soit parfaitement horizontal au Cz privilégié (0.3 pour mes machines de voltige)    Ainsi quand mon fuselage est horizontal, en vol ventre comme en vol dos, je suis loin de l’angle critique de décrochage, j’ai une vitesse plus élevée que la vitesse minimale proche de celle de l’incidence critique et le rendement de mon aile est meilleur. Ce sont donc bien les corrections que je serai amené à effectuer pour conserver mon fuselage horizontal qui m’indiquent si l’air que je traverse monte ou descend : si je dois pousser le manche de profondeur pour rester horizontal, c’est que l’incidence a augmenté et donc que je suis dans une zone ascendante. Si inversement je dois tirer le manche de profondeur pour rester horizontal, c’est que l’incidence a diminué indiquant une zone descendante.

Il faut non seulement s’astreindre à garder le fuselage horizontal en ligne droite, mais aussi en virage ; donc aussi apprendre à virer sans changer l’attitude du fuselage par rapport à l’horizontale. Engager le virage à la dérive et aux ailerons sans sur-piloter, en douceur et sortir du virage de façon progressive.  Le maintien du fuselage en position horizontale doit rester la règle de base de tout pilotage en recherche d’ascendance. Ce sont les corrections nécessaires pour conserver cette attitude générale horizontale qui est le meilleur moyen de comprendre la direction des courants ascendants ou descendants. Par ailleurs ce sont les sur corrections qui augmentent de façon notable la traînée et donc la vitesse de chute en diminuant aussi le rendement du modèle.

Une autre indication importante est donnée par la tendance des ailes à s’incliner à droite ou à gauche. L’aile qui se soulève alors que le modèle est en ligne droite indique que l’air monte à cet endroit et du côté de l’aile qui se soulève. La plupart des pilotes laissent aller le planeur qui va décrire un cercle complet avant de rentrer dans l’ascendance. Ceci est moins efficace que de rentrer immédiatement dans la zone ascendante en contrant immédiatement. Les pilotes expérimentés sauront alors si l’ascendance est plus vive d’un côté une fois pénétrés dans celle-ci. Toujours en fonction de la correction à apporter pour remettre le modèle en ligne droite, fuselage horizontal et ailes équilibrées. Ensuite toujours se maintenir à l’horizontale et constater que le planeur s’élève sans changer d’incidence apparente. En fait l’incidence à tendance à augmenter mais la correction à piquer maintient le fuselage horizontal. Il convient alors de continuer en ligne droite, pour évaluer la largeur de l’ascendance et en déduire sa forme. Il faudra tenter d’enrouler par un virage le moins incliné possible, afin de ne pas trop augmenter la charge alaire. Le sens d’enroulement de l’ascendance alimente les discussions de bord de terrain, mais a peu d’influence sur la vitesse verticale. Il suffit d’observer les rapaces qui volent parfois avec le planeur, pour constater qu’ils spiralent indifféremment dans un sens ou dans l’autre sans qu’un sens n’apparaisse plus avantageux.

Les ascendances peuvent être tout à fait verticales ou inclinées, poussées par un vent géographique ou même hachées, sous forme de bulles plus ou moins rapprochées dans le temps. Se rappeler que l’ascendance dite « de service » n’est pas forcément là où les conseilleurs l’attendent. C’est vrai sur certains sites banalisés, mais ce ne sont pas les plus intéressants. Par contre il existe parfois une certaine régularité dans le déclenchement des bulles par temps ensoleillé. Il faut être un peu observateur pour en apprécier le rythme. Sur certains sites que je fréquente en montagne,  l’ascendance se déclenche parfois moins d’une minute après que le soleil vienne frapper à nouveau le rocher, après avoir été occulté par un cumulus de beau temps.

Quelques éléments indiquant l’ascendance :

Pas facile à observer quand on ne regarde que son planeur, des indices confirment la probabilité ou au mieux la présence de l’ascendance. Il vaut mieux donc bien observer l’environnement du site de vol projeté pour repérer les zones favorables.

  • Les éboulis de schistes noir sont très favorables, surtout si le soleil les éclaire depuis longtemps. C’est souvent le cas dans les préalpes. Les falaises de calcaire blanc ou gris clair sont aussi très intéressantes comme l’ont compris avant nous les chocards qui volent en bande et y font maintes acrobaties.
  • Les zones de forêts sombres sont défavorables, parce qu’elles absorbent l’énergie thermique. S’il a plu récemment, le phénomène est accentué.
  • Des prés d’herbe sèche, situés à proximité de ces zones de forêts deviennent par simple contraste thermique des zones favorables.
  • Un lac ou un étang absorbent aussi beaucoup d’énergie thermique. Là aussi par contraste thermique local, les rivages de sable ou de rocher deviennent des zone à explorer.

Voler sur une crête c’est du vrai vol de montagne ! C’est une zone typique de confluence ou deux masses d’air plus ou moins chaudes et humides s’affrontent entre brise côté ensoleillé et vent géographique de l’autre : la bonne zone de portance se déplace parfois  périodiquement d’un côté à l’autre de la crête et ça peut souvent  porter des 2 côtés. En montagne, anticipez  les dégueulantes ! elles sont d’autant plus sévères que l’ascendance est puissante.

Les déplacements d’air ressentis au sol peuvent indiquer la présence d’ascendances plus ou moins proches. Le vent géographique généralement prévisible par les bons sites météo* peuvent déformer les ascendances thermiques locales. Ces vents géographiques ne doivent pas être confondus avec les vents résultants des ascendances thermiques établies. Parmi ceux-ci, les brises de vallée qui remontent les pentes dominées par des ascendances, peuvent être dans le même sens que le vent géographique, mais aussi en sens inverse ou simplement de travers.  Les habitués du vol de pente sur les rivages hésitent généralement à lancer quand le vent est absent. Même de très bons pilotes de bord de mer restent perplexes devant une absence totale de brise. Le cas le plus déroutant se manifeste quand les habitués du VTR lancent vent dans le dos. Ils ont simplement compris que l’ascendance est à quelque distance de la pente et qu’elle est assez vigoureuse pour aspirer de l’air  sur l’autre côté de la crête où se trouve le pilote. Ce n’est pas le cas le plus courant mais ça arrive suffisamment souvent pour que l’on s’interroge sur son propre diagnostic du site. Il faut donc bien analyser la situation locale : relief, végétation, couleurs du sol, éclairement, situation météo, formes des nuages à proximité etc.  Les oiseaux sont aussi de bons indicateurs d’ascendances. Si les rapaces sont très visibles et faciles à observer (vautours, gypaètes barbus, aigles, buses etc.) les martinets, les faucons, les milans sont autant d’oiseaux qui indiquent régulièrement de belles ascendances. Parfois tous ces oiseaux viennent vous rejoindre et il est amusant de tenter de monter aussi vite qu’eux. Parfois vous les suivez voire les précédez sans trop de difficulté, parfois ils vous laissent sur place. 

C’est toujours un grand bonheur de voler avec chacun de ces oiseaux. Si j’ai été parfois attaqué par un aigle, j’ai toujours laissé le champ libre à l’animal qui voulait défendre son territoire. Parfois celui-ci était tellement déterminé à chasser mon modèle qu’il finit par se retrouver à quelques mètres du pilote. Comprenant la situation il partait alors en un plané superbe.   

Se poser en VTR :

L’exploitation des nombreux sites de vol qu’autorise une bonne pratique du VTR, impose de pouvoir se poser en sécurité. Il faut donc utiliser un modèle adapté à la pente et à la zone de posé. C’est en effet la pente et sa configuration utile qui décide d’abord du type de modèle à utiliser. Les sites de vol utilisables sont alors innombrables et on pourrait s’étonner que les plus intéressants ne soient pas les plus fréquentés. La difficulté tient essentiellement dans la reprise de contact avec le sol. Beaucoup de pilotes formés en plaine ne savent tout simplement pas se poser en pente. Si quelques sites possèdent une zone autorisant les posés comme en plaine et sont donc très fréquentés, la plupart des sites intéressants demandent une technique de posé spécifique à la pente.

Le principe général est pourtant simple : il faut faire comme en aviation grandeur. Il faut se poser en remontant la pente. Il faut éduquer le regard  pour bien évaluer la vitesse de vol par rapport à l’air en déplacement. Il faut aussi savoir placer le fuselage parallèle à la pente et réduire peu à peu la distance par rapport au sol et la vitesse. C’est comme en plaine, mais de façon oblique ! Les pilotes non familiers de cette façon de se poser ont très peur de se poser vent dans le dos. Ils utilisent des aérofreins inadaptés à ce type de prise de terrain…. Les aérofreins détruisent la portance et accentuent le risque de décrochage. Il vaut mieux utiliser des volets de courbure,  mais réglés pour conserver de la défense aux ailerons.

Pour apprendre à se poser en pente, donc en remontant la pente avec le vent dans le dos, il faut commencer par le faire de côté. Ainsi on voit à la fois la pente et le planeur et on peut ajuster l’angle de la trajectoire avec la pente. Si on est trop haut ou trop bas, il suffit de faire un virage pour repartir au trou et recommencer. 

 

Se poser à plat sur la crête et vent de travers est beaucoup plus dangereux que de se poser en remontant la pente comme sur cette image. Sur la crête, les tourbillons soulèvent l’aile du côté du trou et le planeur pivote ou se retourne. Il reste relativement facile de poser n’importe quel modèle même sur des pentes à 45°. Il suffit d’apprendre.

Il ne faut jamais se précipiter et il est bien plus efficace de refaire plusieurs fois l’approche que de risquer de se poser trop vite ou de décrocher et de planter le modèle. Les poireaux que l’on peut voir dans certaines compétitions de durée précision sont une ineptie qui assure des revenus réguliers aux commerçants du modélisme. Ces pilotes seraient pour la plupart bien incapables de se poser en pente. Pour apprendre à se poser en pente, à fortiori sur des sites étroits, il est préférable d’avoir un modèle rustique conçu pour faciliter la rotation voire l’éjection des ailes du fuselage en cas d’accrochage ou de posé un peu brutal. Très peu de planeurs du commerce sont conçus pour. Pour nos stages, nous avons développé une machine au demeurant capable de toute la voltige classique, qui repartait quasiment toujours après chaque atterrissage.

Ici le crochet en contreplaqué qui permet d’accrocher les élastiques de maintien de l’aile. Certains trouvent ce dispositif un peu ringard, mais il a l’avantage d’être efficace en cas de posé non conforme. Ce qui n’est pas le cas avec des fixations d’aile rigides.

 L’Alibi a en effet des ailes immobilisées par des élastiques. Pourtant de construction tout plastique, les ailes peuvent gicler en cas de planté sévère. On remet les élastiques et ça repart. Cette astuce technique est issue d’un planeur école de Robert Bardou qui a beaucoup fait pour le développement du vol de pente et du vol thermique de relief. Nous avons repris ce système et nous nous y tenons pour les planeurs école de base. Ceci dit, avec un peu d’entrainement, nos planeurs de voltige peuvent aussi se poser en pente sur tous les sites que nous fréquentons. Le planeur n’est d’ailleurs lancé sur un nouveau site à explorer que si une surface adaptée permet de le poser.

D’autres systèmes permettent l’éjection des ailes :
Ici sur un Quartz de première génération, avec des clefs plates.

Le vol de pente et plus précisément le vol thermique de relief  n’est pas une agitation désordonnée sur le bord de la pente, mais la conduite d’un modèle sur une trajectoire géométrique. Voltiger devient le meilleur moyen de perfectionner vraiment son pilotage. Le planeur placé volontairement dans toutes les attitudes et remis à plat permet de mieux comprendre la mécanique du vol et donc de voler en sécurité avec n’importe quel modèle à ailes fixes. Pratiquement tous les modèles correctement réglés et pilotés peuvent faire quelques figures de voltige. Le vol dos et les figures inversées marquent une étape significative. Les figures déclenchées est une autre étape et les enchainements bien cadrés et rythmés révèlent enfin une bonne maitrise. La voltige totale que certains pilotes pratiquent essentiellement est en perpétuelle évolution. Il est possible d’en voir des échantillons ici: https://voltige-planeur-rc.net

Ce sujet est l’avenir du vol silencieux en espace libre défendu par F+.

Le Vol Thermique de Relief conduit tout naturellement à faire voltiger le planeur.

Tout simplement parce qu’on vole à la hauteur des yeux, que le vol peut se prolonger aisément, que l’on peut convertir l’altitude en vitesse et la vitesse en altitude.

Ci dessus, face au Mont Blanc et au massif de Tré-la-Tête, une « avalanche », simple tonneau au sommet d’une boucle positive.

Il est donc tentant de jouer avec son modèle. Mais avec une portance généreuse, la voltige peut conduire trop facilement à un pilotage brouillon. Il est courant de voir des pilotes agiter leur modèle sur le haut de la pente sans se soucier des autres modèles en vol et sans recherche de trajectoires élégantes. C’est pourtant cette recherche qui transforme peu à peu une agitation mal maitrisée en une voltige élégante. Ces pilotes préfèrent des machines de petite taille, souvent en mousse, acquises plutôt que construites par eux-mêmes. Ils occupent l’espace sans beaucoup de recherche et d’attention aux autres. Cette voltige n’est alors que de l’agitation désordonnée et n’amène pas à faire de réels progrès en pilotage. Pourtant la voltige est génératrice de plaisir par la simple vision d’une figure bien conduite, aisément reconnaissable même par des non-initiés.  La variété d’interprétation de figures simples est déjà un domaine d’expression riche de découvertes. Dès que le pilote commence à maitriser des enchainements simples en marquant bien le début et la fin de chaque figure, il peut passer à des combinaisons plus complexes. Le vol dos renouvelle complètement le plaisir en ouvrant un autre domaine d’expression. Toutes les figures réalisées en vol ventre peuvent en effet se réaliser en vol dos. Quand le vol dos devient aussi facile que le vol ventre, le pilote entre dans une domaine encore plus riche de sensations de plus en plus subtiles et profondes. Les changements de rythme des tonneaux lents sans élan, leur enchainement le long de trajectoires circulaires sont des domaines qui peu à peu font comprendre vraiment comment le planeur vole. Il faut en effet piloter ces figures de façon continue, sans que les ordres n’apparaissent être imposés au planeur.

Un autre domaine est celui des figures à grand développement vertical. Ces figures obligent le pilote à bien lire le paysage, pour garder une marge de sécurité raisonnable. Il découvre alors un autre domaine de vol, pour peu que son modèle soit conçu pour résister aux grands écarts de vitesse et donc aux accélérations qui en résultent. Les sensations deviennent intenses, peut-être moins subtiles que la voltige fine par conditions légères, mais c’est un autre domaine à explorer graduellement, avec prudence. Le pilote qui aime suffisamment la voltige pour ne pas avoir besoin de public pour s’exprimer entre dans une sorte d’initiation, où il vit complètement le passage de l’air tout au long de sa machine. Il n’est plus aux commandes d’un jouet mais il vole et surtout anticipe la trajectoire pour avoir le plaisir d’observer son modèle le long de lignes précises et prévues dans l’espace.

Les vrilles à plat se déclinent aussi en dos et avec des changements de sens à la demande.

Je me rappelle encore du premier tonneau que j’ai passé en vol de pente. C’était bien au-dessus du village de La Grave, face à la Meige en Oisans. Je pilotais un Roitelet de Pagani, dans un vent soutenu. Je n’étais à l’époque pas capable d’analyser l’aérologie et mon tonneau de débutant était très rapide pour ne pas prolonger le vol dos, dont j’étais encore parfaitement incapable. Du coup j’en ai enchainé toute une série pour bien m’assurer que je pouvais vraiment passer le tonneau, que le planeur ne se dirigeait pas nécessairement vers le sol et que je pouvais reprendre facilement une l’altitude de sécurité. Ces premiers tonneaux m’ouvraient tout un domaine de vol à explorer. Depuis j’en ai réalisé des milliers et je pense que plus le tonneau est lent, plus son pilotage est intéressant.

Durant nos stages de pilotage des Saisies, nous aimions démontrer aux élèves que pour voltiger en planeur il n’est pas nécessaire de posséder une machine dédiée. Chaque planeur modèle réduit télécommandé peut effectuer des figures de base dès qu’il est bien réglé et surtout bien piloté. Le réglage doit être adapté au modèle pour en respecter la vocation. Les pilotes de planeurs de voltige qui veulent progresser deviennent souvent des chercheurs. Ils se mettent à explorer l’influence des réglages sur les capacités d’évolution. Ils découvrent la limite des matériels : limites des servos ou des ailes des modèles. Ils doivent peu à peu comprendre comment fonctionne vraiment une aile, avec son profil, son allongement, sa géométrie. Ils apprennent à évaluer la qualité de construction et de conception des machine acquises ici ou là. Ils mesurent la différence entre leurs espoirs d’évolution et les limites du modèle, de ses réglages et parfois de sa robustesse à l’usage !

Sur la Crête des Gites à proximité du refuge du Bonhomme sur le tour du Mont Blanc. Le chemin a été creusé par des chasseurs alpins en 1912. Tout au fond à gauche, le Grand Mont et en bas le Lac de Roselend. A droite sur le Roc du Vent, le bien nommé, une superbe et « gazeuse » via ferrata domine le lac de Roselend.

La voltige en vol thermique de relief n’a pas d’autre limite que l’imagination du pilote. Il doit trouver la pente adaptée à son modèle ou bien évidement l’inverse. J’aime à dire que « la pente fait le planeur et le planeur fait le pilote ». La recherche d’espaces d’évolutions pour voltiger et pas simplement rester en vol est un domaine très générateur de découvertes. Découvertes de paysages, mais aussi des chemins pour aller sur le site envisagé. Découverte de la nature, des rochers, de la végétation et de ses habitants, hommes ou animaux. Mais aussi par la marche plus ou moins longue nécessaire à la recherche de ces lieux privilégiés, le pilote apprend sur lui-même, sur sa résistance, sur sa soif et sa faim. En gros il randonne et s’enrichit au cours de cette marche préliminaire qui invite à la méditation active. Au retour il réfléchit sur les limites constatées et prépare la suite. Limites du modèle, mais aussi limites du pilote. S’il a le plaisir d’être accompagnés de pilotes pratiquant comme lui ces vols à la géométrie variée, les échanges sont encore plus riches et peuvent donner lieu à des hypothèses puis parfois des trouvailles.

La voltige évoluée consiste à explorer les limites de la mécanique du vol. Si la base du plaisir pour beaucoup reste de simplement faire des passages le long de la pente après un piqué conséquent pour montrer qu’ils ont pu acquérir un planeur robuste il y a avec cette machine beaucoup d’autres choses à tenter. Encore faut-il avoir l’imagination, la volonté et la capacité pour s’y mettre.  

La voltige suppose de pouvoir se concentrer sur la trajectoire. Il faut donc disposer d’un espace libre, qui ne sera pas envahi par des modèles mal maitrisés. Pour ma part, j’aime bien voltiger avec quelques pilotes aussi passionnés que moi. Ils ont le mérite de savoir choisir leur trajectoire, en fonction des autres machines en vol en même temps qu’eux. En général j’évite de voltiger s’il y a trop de planeurs en vol. Sauf s’ils sont loin et haut. Ça me laisse tout un espace à hauteur des yeux. Avec des amis voltigeurs, la situation est très différente. Ils observent en permanence autant leur propre modèle que celui des copains. Chacun tente à son tour la figure des autres et très rapidement nous échangeons sur les différences observées. C’est une occasion de progresser rapidement autant dans la définition des qualités d’un modèle que dans la façon de le conduire. Cette façon de procéder permet de lever le doute sur nos limites ou capacités et sur le potentiel réel de nos machines. Les planeurs évoluent petit à petit et les pilotes aussi. Enfin il nous arrive de pouvoir filmer les évolutions de nos machines. Le montage des vidéos prolonge nos observations et redonne de l’élan à nos projets. C’est ainsi qu’avec quelques amis nous avons fait évoluer nos machines pour leur permettre de nouvelles figures inaccessibles aux planeurs grandeur. Nous avons pu partager avec des pilotes du monde entier et nous savons que les limites d’aujourd’hui seront à leur tour dépassées par un travail patient et joyeux. Finalement la pratique de la voltige planeur permet d’améliorer son pilotage et donc la sécurité des modèles quels qu’ils soient. Il n’est alors plus question de papillonner entre des machines devenues des trucs consommables, mais de conserver un modèle bien conçu et bien réalisé, longtemps, voire très longtemps. En connaissant parfaitement son modèle, les limites convenablement exploitées deviennent des avantages en voltige.

  • Pour en savoir plus sur ce domaine de la voltige planeur, le site animé par François Cahour vous est accessible ici : https://voltige-planeur-rc.net
  • Pour progresser en voltige il y a aussi son bouquin : Voltige Planeur RC. C’est la 3ème édition avec les modes 1 et 2. Pour lire quelques pages:
  • Une version anglaise est disponible auprès de l’auteur avec les modes de pilotage 1 et 2 : Aerobatic RC Glider.

Pour conclure cette présentation du vol thermique de relief, voici quelques liens vers des sites utiles pour préparer ses vols

 
A la Brêche de Parozan, Extrait de "Vol aventure" publié il y a quelques années dans feu RCpilot. aquarelle de Danièle Cahour

5 commentaires

  • Super reportage et explications. Très beau paysage, vivement la nouvelle saison. Bravo et merci

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  • Bravo François pour cet excellent article, une fenêtre de bonheur dans notre océan de grisaille !

    Répondre
  • Article très intéressant, bien structuré et avec de très belles photos. J’ai hâte de trouver le temps de le lire en détail.
    Concernant les thermiques déclenchant sous le vent de la pente, nos amis vélivoles allemands appellent ceci « lee thermik ».
    J’ai rencontré ces conditions lors d’un passage à l’aiguille Croche il y a une quinzaine d’années. Je n’ai pas osé lancer vent dans le dos car j’avais un planeur au fuselage fragile et ne voulais pas risquer de me crasher dans les éboulis si je ratais le thermique. Pourtant, la pompe était bien là. Un Twin Astir de Challes les Eaux m’a nargué en l’accrochant juste devant moi.

    Répondre
  • Document très intéressant explicite je n’ai pas souvent l’occasion de voler en pleine montagne , j’ai volé une fois au Semnoz. Je vol plus souvent depuis les côtes Normandes (vol de falaise) Cette année si le COVID le permet je vais au lac de Serre ponçon en camping-car si vous avez des tuyaux pour voler la bas je suis preneur et aussi partager des moments avec des locaux. Grand merci pour le partage et cet exposé bien maitrisé.
    Cordialement

    Auger R

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